Blockchain et RGPD : compatibilité, risques et solutions

CODPO, cabinet de conseil RGPD basé à Paris, accompagne les entreprises innovantes qui utilisent la blockchain, qu’il s’agisse de smart contracts, d’actifs numériques ou de registres partagés, pour assurer la conformité réglementaire de leurs projets.
Un défi au croisement du droit et de la technologie
La blockchain est souvent présentée comme une technologie révolutionnaire : transparente, infalsifiable et décentralisée. Mais ses caractéristiques intrinsèques, notamment l’immutabilité et la distribution des données, entrent parfois en tension avec les principes du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD).
Ce paradoxe soulève une question majeure : comment concilier la transparence de la blockchain avec le droit à l’oubli et le contrôle des données personnelles ?
Les fondamentaux du RGPD en rappel
Le RGPD repose sur plusieurs principes directeurs :
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Licéité, loyauté et transparence : tout traitement de données doit être clair et justifié.
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Minimisation : seules les données nécessaires à la finalité doivent être collectées.
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Exactitude : les informations doivent être tenues à jour.
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Limitation de conservation : les données ne doivent pas être conservées au-delà du nécessaire.
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Intégrité et confidentialité : les responsables doivent assurer la sécurité des traitements.
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Droit à l’effacement (article 17) : les personnes peuvent demander la suppression de leurs données.
Ces principes, simples en apparence, deviennent complexes à appliquer dans un registre distribué qui ne permet pas la modification ou la suppression de blocs une fois inscrits.
Où se situent les données personnelles dans une blockchain ?
Une idée reçue consiste à penser que la blockchain ne contient pas de données personnelles. Pourtant, c’est souvent le cas.
Les informations inscrites peuvent être :
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directement identifiantes : nom, adresse, coordonnées, identifiants uniques ;
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ou indirectement identifiantes : clés publiques, pseudonymes, empreintes cryptographiques, métadonnées transactionnelles.
Selon le Comité Européen de la Protection des Données (CEPD) et la CNIL, même une clé publique pseudonyme peut être considérée comme une donnée personnelle si elle permet d’identifier indirectement une personne physique.
Dès lors, le RGPD s’applique à de nombreuses blockchains publiques et privées, même si les données y sont pseudonymisées.
Les principaux points de tension entre blockchain et RGPD
1. L’immutabilité et le droit à l’effacement
L’un des atouts de la blockchain est aussi son plus grand défi juridique : les données ne peuvent pas être modifiées ni supprimées.
Or, le RGPD reconnaît aux personnes le droit à l’effacement. Cela rend difficile l’application directe de ce droit lorsque des informations personnelles figurent dans un bloc validé.
2. La détermination du responsable de traitement
Le RGPD impose d’identifier un responsable de traitement et, le cas échéant, un sous-traitant.
Dans un système décentralisé, cette responsabilité devient floue : chaque nœud participant à la validation peut potentiellement être considéré comme co-responsable.
La CNIL recommande de clarifier les rôles contractuellement lorsqu’une blockchain est opérée dans un cadre de consortium ou de réseau autorisé.
3. La localisation des données
Le RGPD encadre strictement les transferts de données hors de l’Union européenne.
Or, les blockchains distribuent les données sur des serveurs du monde entier, souvent sans possibilité de choisir où elles sont stockées. Cela soulève des difficultés de souveraineté et de conformité.
4. L’exercice des droits des personnes
Le droit d’accès, de rectification ou d’opposition suppose de pouvoir retrouver, corriger ou supprimer des informations.
Dans la blockchain, ces actions sont techniquement impossibles sur les blocs validés. Il faut donc prévoir des mécanismes de contournement : par exemple, stocker les données en dehors de la chaîne et ne garder qu’un identifiant ou un hash.
Les solutions techniques et juridiques envisageables
La pseudonymisation et le chiffrement
Une solution consiste à ne jamais inscrire directement de données personnelles dans la blockchain.
À la place, on peut stocker des empreintes cryptographiques (hash) ou des identifiants pseudonymes, tandis que les données réelles restent hébergées dans une base de données externe, sécurisée et modifiable.
Cette approche, dite off-chain, permet d’allier traçabilité et respect des droits des personnes.
Le recours aux blockchains privées ou permissionnées
Contrairement aux blockchains publiques, les blockchains permissionnées permettent de définir des règles de gouvernance et d’identifier clairement les acteurs responsables.
Elles offrent un meilleur contrôle sur :
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les accès ;
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les conditions d’écriture et de validation ;
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la suppression des données ou la révocation d’un nœud.
Cette architecture est plus compatible avec les exigences du RGPD, notamment la responsabilité partagée et la sécurité des traitements.
Les smart contracts conformes au RGPD
Les smart contracts automatisent l’exécution d’obligations, mais ils peuvent aussi embarquer des règles de conformité :
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gestion de la durée de conservation ;
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mise à jour des consentements ;
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mécanismes d’oubli contrôlé ou de réécriture des pointeurs de données.
Bien que la modification d’un bloc reste impossible, il est possible de rendre les données inaccessibles ou de désactiver leur lien depuis un smart contract, simulant ainsi un effacement logique.
Les solutions hybrides
De plus en plus de projets optent pour des architectures hybrides :
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les métadonnées et les empreintes cryptées sont inscrites on-chain,
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les données personnelles sont stockées off-chain dans des serveurs sécurisés (hébergeurs certifiés RGPD, HDS ou ISO 27001).
Cette approche combine les avantages de la blockchain (traçabilité, intégrité) et la flexibilité nécessaire au respect du RGPD.
La position de la CNIL et du CEPD
La CNIL adopte une position nuancée : elle reconnaît le potentiel de la blockchain pour renforcer la confiance et la traçabilité, mais souligne les limites techniques face aux exigences du RGPD.
Elle recommande notamment :
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de limiter les données personnelles inscrites sur la chaîne ;
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de préférer la pseudonymisation à l’anonymisation (plus réaliste techniquement) ;
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de choisir des blockchains permissionnées pour les usages professionnels ;
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et d’évaluer les risques via une AIPD avant tout déploiement.
Le Comité Européen de la Protection des Données (CEPD) partage cette analyse : la compatibilité entre blockchain et RGPD dépend essentiellement de la conception du projet et de la gouvernance mise en place.
L’importance de l’AIPD dans un projet blockchain
Avant de lancer un projet impliquant des données personnelles, une Analyse d’Impact relative à la Protection des Données (AIPD) est indispensable.
Elle permet d’anticiper les points de non-conformité et de définir un plan de réduction des risques.
L’AIPD doit notamment examiner :
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la nature des données stockées ;
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le type de blockchain utilisée (publique, privée, hybride) ;
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les flux de données transfrontaliers ;
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les mécanismes de sécurité et de pseudonymisation ;
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les procédures d’exercice des droits des personnes.
CODPO accompagne les entreprises dans la réalisation complète de l’AIPD, en collaboration avec leurs équipes techniques et juridiques, afin d’assurer une conformité documentée et durable.
Vers une convergence entre blockchain et protection des données
La blockchain et le RGPD ne sont pas incompatibles, mais exigent une ingénierie juridique et technique avancée.
De nouvelles approches émergent, comme les blockchains éphémères, le chiffrement homomorphe ou la zero-knowledge proof, permettant de prouver une information sans la révéler.
Ces innovations ouvrent la voie à une blockchain éthique, respectueuse de la vie privée tout en préservant la transparence et la confiance.
Comment CODPO accompagne les projets blockchain
- CODPO aide les entreprises et institutions à concevoir des solutions blockchain conformes au RGPD :
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audits de conformité et recommandations techniques,
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réalisation d’AIPD,
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rédaction des politiques de gouvernance et des contrats entre acteurs,
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accompagnement DPO externalisé,
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sensibilisation et formation des équipes.
Grâce à une approche pragmatique, CODPO permet aux projets innovants d’allier performance, conformité et sécurité.
Conclusion
Loin d’être antagonistes, le RGPD et la blockchain peuvent coexister à condition de penser la conformité dès la conception.
En intégrant la protection des données dans l’architecture technique, en adoptant une gouvernance claire et en choisissant les bons outils juridiques, les entreprises peuvent exploiter tout le potentiel de la blockchain sans enfreindre la réglementation européenne.
CODPO accompagne ces acteurs dans cette transition, pour bâtir des solutions fiables, éthiques et conformes.
N'hésitez pas à faire appel à CODPO si vous avez besoin d'aide pour mettre votre entreprise en conformité avec le RGPD.

